Avez-vous déjà joué à un scénario à embranchements qui fonctionnait correctement d’un point de vue technique, mais qui n’était ni intéressant ni réaliste ? En effet, le fait d’avoir des embranchements dans un scénario n’est qu’une pièce du puzzle lorsqu’il s’agit de créer un scénario qui a un impact. Les choix dans vos scénarios, la façon dont vous les écrivez et dont vous les utilisez, sont tout aussi essentiels pour donner du sens à ce type d’expérience d’apprentissage.
Lorsque vous réfléchissez aux façons d’utiliser le choix de manière stratégique, il existe une excellente source d’inspiration que vous n’avez peut-être pas envisagée : les jeux vidéo. Les concepteurs de jeux vidéo s’efforcent de rendre les diverses possibilités de choix de scénario attrayantes. Examinons de plus près quelques bonnes pratiques que nous pouvons tirer de l’analyse des scénarios de jeux vidéo.
Les premiers choix doivent avoir de faibles enjeux
Vous savez ce qui est vraiment frustrant ? Se rendre compte qu’on a sélectionné par erreur le mauvais choix parce qu’on n’a pas compris le fonctionnement de l’interface utilisateur. C’est pourquoi de nombreux jeux vidéo vous facilitent la tâche en veillant à ce que les premières options avec lesquelles vous interagissez n’affectent pas vos résultats et vous permettent d’accéder à tout le scénario. Ces questions plus simples sont essentiellement des mini-tutoriels, vous donnant la possibilité de faire quelques erreurs sans risque.
Avec un scénario e-learning à embranchements, vous n’aurez peut-être pas autant de temps pour inclure une pratique guidée que dans un jeu de plusieurs heures, mais vous pouvez probablement vous permettre de poser aux apprenants une ou deux questions faciles au début pour les aider à s’habituer à son fonctionnement.
Tous les choix ne doivent pas nécessairement conduire à de nouvelles branches
Lorsque vous commencez à calculer le nombre de nouvelles possibilités que chaque question peut créer, l’idée de construire un long scénario peut sembler décourageante. Mais les jeux vidéo ont prouvé qu’il est toujours possible de créer des expériences réalistes sans que chaque choix ne soit déterminant.
L’un des premiers jeux auxquels j’ai joué qui illustre bien cette idée était la série The Walking Dead de Telltale (lien vers le site anglais). Lorsque vous faites des choix de dialogue qui ont un impact sur la suite du scénario, un message s’affiche à l’écran indiquant que l’autre personnage se souviendra de votre décision. Ainsi, lorsque ce message n’apparaît pas, vous savez que votre choix ne modifie pas l’histoire. Mais le fait de le savoir ne rend pas ces interactions moins intéressantes ou amusantes. Après tout, dans la vraie vie, les différentes options ne conduisent pas toutes à des résultats différents.
Lorsque vous planifiez votre scénario, voici quelques façons de gagner du temps de développement :
- Comme toutes les décisions ne doivent pas nécessairement mener à une nouvelle branche de l’histoire, gardez un œil sur les moments où vous pouvez simplifier la suite des choix. Parfois, toutes vos options mèneront logiquement au même écran, par exemple si elles sont là uniquement pour que l’apprenant s’entraîne ou pour développer l’histoire. Et si vous fournissez déjà un retour immédiat à l’écran sur un choix, vous n’aurez peut-être pas besoin de créer une branche de l’histoire par la suite pour faire passer votre message.
- Recherchez les cas où plusieurs réponses peuvent conduire au même écran. Par exemple, dans des situations simples où un choix de scénario est soit correct, soit incorrect, vous n’aurez peut-être besoin de créer que deux branches, quel que soit le nombre d’options proposées aux apprenants.
- Bien que votre histoire comporte des embranchements, ces différents chemins peuvent se rejoindre plus tard. Vous pouvez réunir des branches lorsque cela a du sens pour la situation.
Il est possible de proposer uniquement des bonnes options ou uniquement des mauvaises
De nombreux e-learning suivent la même formule : une option est excellente, une autre est acceptable et la dernière doit être évitée. Ce n’est pas une mauvaise façon de structurer les choix, mais ce n’est souvent pas réaliste. De plus, dans certaines situations réelles, aucune des options disponibles n’est vraiment bonne. Le jeu Spent (Lien en anglais) est un parfait exemple de la façon d’appliquer ce principe aux scénarios. Conçu pour aider les gens à mieux comprendre les défis quotidiens de la pauvreté, les joueurs doivent peser le pour et le contre face à des choix cornéliens et essayer de choisir celui qui entraîne le moins de dommages. Vous n’avez pas de bons choix dans le jeu précisément parce qu’il n’y a pas de bonnes options dans les expériences de la vie réelle qu’il décrit.
Ainsi, si une situation réelle que vous reproduisez dans votre scénario n’a pas d’options positives, vous pouvez proposer uniquement des mauvais choix et mettre les apprenants au défi d’identifier le moins nocif. Prenons un scénario dans lequel les apprenants s’entraînent à aider des clients en colère. S’ils font suffisamment d’erreurs en cours de route, il est logique qu’ils finissent par être à court de choix qui pourraient sauver la situation comme par magie. À un moment donné, ils devront peut-être simplement limiter les dégâts pour éviter que la situation ne s’empire.
Cela fonctionne également dans l’autre sens : il est parfois judicieux de proposer plusieurs bonnes options. Pour revenir à notre exemple, il existe souvent plusieurs façons d’aider un client mécontent. Commencer le scénario avec plusieurs bons choix différents pourrait aider les apprenants à déterminer l’approche qui leur semble la plus naturelle.
Certains choix passés peuvent débloquer des options supplémentaires
Vous souvenez-vous de la collection un livre dont vous êtes le héros ? C’était une façon amusante et low-tech d’utiliser les embranchements narratifs que nous utilisons aujourd’hui dans les scénarios e-learning. Mais les embranchements de ces histoires étaient simplistes, chaque ensemble d’options fonctionnant de manière isolée. C’est pourquoi le passage au numérique a été si utile pour ce type de narration : l’histoire peut désormais « se souvenir » de vos choix. Et cela ouvre toutes sortes de nouvelles possibilités pour ajuster les embranchements de votre histoire ou vos options de conversation en fonction d’une ou plusieurs décisions passées.
Les romans visuels comme One Night, Hot Springs montrent très bien à quel point cela peut rendre une histoire complexe. Tout comme dans les situations réelles, les choses que vous dites ou faites modifient la façon dont les personnages interagissent avec vous pour le reste du jeu, et pas seulement immédiatement après. De nouvelles options de conversation s’ouvrent en raison des réactions passées. Et certains chemins de l’histoire ne peuvent être débloqués que si vous faites une combinaison spécifique de choix plus tôt.
Bien que ce niveau de complexité ne soit pas toujours nécessaire, cela peut permettre d’améliorer les scénarios impliquant des conversations ou des relations interpersonnelles. Il est donc idéal pour l’apprentissage des « soft skills », comme les conversations difficiles, le coaching, les entretiens, etc. Il fonctionne également bien pour les scénarios d’escape game où les apprenants doivent trouver des objets et résoudre des énigmes dans un ordre spécifique.
Les limites de temps peuvent générer du stress
Rien de tel pour augmenter la pression que de voir le temps s’écouler. Ce stress peut rendre les scénarios plus réalistes et motiver les apprenants à réfléchir rapidement, lorsqu’il est utilisé de manière stratégique.
Les jeux vidéo utilisent des limites de temps pour modifier le comportement de toutes sortes de façons, du champ de temps de Super Mario Bros qui vous encourage à accélérer au compte à rebours des bombes dans Keep Talking and Nobody Explodes (Continuez à parler et personne n’explosera, disponible en français) qui amplifie votre anxiété et vous fait faire plus d’erreurs. Ces limites peuvent augmenter la difficulté d’un niveau ou vous pousser à accélérer votre rythme de jeu. Mais dans le cas de Keep Talking, le chronomètre rend également la situation plus réaliste.
Si les limites de temps peuvent être un puissant facteur de motivation dans les scénarios e-learning, elles peuvent également se retourner contre vous si vous ne faites pas attention à la manière et au moment où vous les utilisez. Voici quelques bonnes pratiques à garder à l’esprit lorsque vous les utilisez :
- Autoriser les apprenants à désactiver les limites de temps. Les défis chronométrés peuvent poser un problème d’accessibilité pour certains apprenants. Par conséquent, si la limite n’est pas une obligation légale, envisagez d’intégrer un moyen de la désactiver.
- N’utilisez de limite de temps que si cela améliore l’apprentissage. Une petite dose de stress lié au temps peut faire des dégâts. Il est préférable de réserver cette fonctionnalité aux cas où le respect d’une limite de temps est fortement lié aux objectifs d’apprentissage.
- Ne rendez pas la tâche trop difficile. Assurez-vous que les limites que vous fixez sont réalistes et réalisables. S’il est trop difficile de répondre aux exigences, votre limite de temps pourrait inciter les apprenants à abandonner plutôt que de s’impliquer.
Faites en sorte qu’il soit facile et intéressant de rejouer
L’un des atouts des scénarios à embranchements pour l’apprentissage est la possibilité de rejouer l’expérience pour voir ce qui se serait passé avec d’autres choix. C’est comme si vous aviez une machine à remonter le temps : vous pouvez revenir en arrière et voir ce qui se serait passé si vous aviez fait les choses différemment. C’est amusant du point de vue de la curiosité, mais cette fonctionnalité offre également une opportunité fantastique aux gens d’apprendre de leurs erreurs et de réessayer.
De nos jours, de nombreux jeux vidéo misent sur l’idée d’embranchements narratifs et sur la possibilité de rejouer, mais malheureusement, ils ne sont pas tous agréables à jouer. Ceux qui donnent envie d’y rejouer plusieurs fois ont généralement deux points communs : ils sont faciles à rejouer et les embranchements narratifs sont suffisamment différents pour que le fait de rejouer le scénario en vaille la peine.
Overboard (lien en anglais), un roman visuel dans lequel vous incarnez un meurtrier qui tente de dissimuler ses traces, en est un parfait exemple. Il est facile de passer le contenu, ce qui vous permet de parcourir rapidement les parties que vous avez déjà vues. Le jeu met également en évidence les choix passés, ce qui permet de savoir facilement quelles options vous n’avez pas encore essayées. Ensuite, à la fin de chaque partie, il partage des indices sur les nouvelles choses à essayer la prochaine fois. Et comme l’histoire prend de nombreuses directions différentes en fonction de vos choix, elle est non seulement facile à rejouer, mais aussi amusante.
Ces façons de faire sont simples à reproduire dans des scénarios e-learning. Vous pouvez encourager les apprenants à faire plusieurs parties en faisant en sorte que les choix et les chemins de votre histoire soient réellement différents les uns des autres. Ne pas verrouiller la navigation permet de parcourir rapidement le contenu déjà vu. Identifier clairement les choix passés et proposer des indices peut aider les apprenants à trouver plus facilement de nouvelles branches de l’histoire. Et l’ajout d’un bouton Rejouer à l’écran final encourage les apprenants à faire une autre tentative.
Le mot de la fin
Il est clair que créer un scénario à embranchements convaincant ne consiste pas seulement à s’assurer que chacune de vos diapositives redirige l’apprenant au bon endroit : il s’agit également de relier vos choix d’histoire de manière réaliste et de susciter une réflexion approfondie.
En réfléchissant à la manière dont vous motivez et encouragez les apprenants, en supprimant les obstacles frustrants et en rendant votre contenu à la fois réaliste et intrigant, vous pouvez concevoir des scénarios qui tirent pleinement parti de tout ce que ce format a à offrir.
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